Naropa était un prince indien. Quand il eut l'âge de onze ans, ses parents le conduisirent au temple pour parfaire son éducation. Il y séjourna durant trois années et devint un élève savant et exceptionnel.
A l'âge de seize ans, il fut contraint au mariage forcé ; ce mariage dura huit années et s'acheva finalement par une séparation d'un commun accord entre les deux époux. Par la suite, Naropa continua à se consacrer complètement aux études bouddhistes. A vingt-huit ans, il fit vœu de devenir bonze et sa renommée se répandit progressivement en tous lieux.
En 1049, Naropa participa à un débat sur la philosophie religieuse dans la très célèbre université indienne de Nalanda. Il gagna cette compétition et fut élu principal abbé.
Un jour, pendant que Naropa lisait des Sutras, une vieille dame extrêmement laide apparut soudainement devant lui et demanda : « Que lisez-vous ? » Naropa lui répondit : « Je suis en train d'étudier les enseignements de Bouddha. » Elle lui demanda alors : « Est-ce que vous les comprenez ? » Il disait sans hésitation : « Bien sûr ! » La vieille femme continua de demander : « Est-ce que vous comprenez les mots ou est-ce que vous comprenez leur sens ? » Il répondit : « Les mots. » La vieille femme fut très joyeuse et dansa. Naropa pensa qu'il pouvait peut-être la rendre encore plus joyeuse ; sur ce il ajouta : « Je comprends également la signification de ces mots. » La vieille femme se mit alors brusquement à pleurer. Comme Naropa ne saisissait pas, elle lui répondit : « J'étais joyeuse parce qu'un grand disciple comme vous n'avait pas menti et avait honnêtement reconnu qu'il ne comprenait que les mots. Mais lorsque vous avez menti, affirmant comprendre la signification des textes tout en sachant que vous ne la compreniez pas, je me suis sentie très triste. » Il lui demanda alors : « Quelle est donc la personne qui comprend le sens de ces mots ? » Elle lui répondit : « Mon frère Tilopa. » Naropa demanda : « Où qu'il soit, je vous prie de me le présenter. » Elle lui répondit : « Allez-y vous-même ! Faites-lui preuve de votre respect et implorez-lui de vous permettre de comprendre le sens des mots. » Après avoir parlé ainsi, la vieille femme disparut dans l'air comme un arc-en-ciel. (Elle était en fait Vajrayogini, incarnée en Corps d'émanation. Son karma négatif n'ayant pas été complètement épuré, Naropa ne pouvait la voir qu'en tant que femme très laide et vieille.)
Ainsi, Naropa, déterminé, quitta l'université de Nalanda et partit à la recherche de Tilopa.
Au long de son chemin à la quête de son maître, il rencontra beaucoup de situations difficiles. Après chaque obstacle, il entendait une voix retentissant du ciel lui disant que ce qu'il avait juste éprouvé était des épreuves que lui donnait son guru. A un moment où il ressentit une immense détresse et un profond désespoir, et où il fut presque au bord du suicide, Tilopa apparut devant lui.
Bien que Naropa pût enfin rencontrer son maître Tilopa, il dut encore subir tous types de grandes épreuves afin d'acquérir la totalité des enseignements. Il dut supporter douze années de durs labeurs connus sous le nom des « douze épreuves majeures de Naropa ». Mais en fait, il acquit aussi douze sortes d'enseignements et de transmissions orales essentielles.
Durant ces douze épreuves majeures, il y eut une fois où le maître et le disciple furent sur le toit d'un temple. Tilopa disait : « Si j'avais un disciple, il sauterait sûrement d'ici ! » Naropa pensa que son maître s'adressait certainement à lui, et sauta sans hésitation. Il tomba brutalement par terre, subissant toute la souffrance de son corps. Tilopa descendit et lui demanda : « Comment vas-tu ? » Naropa répondit : « J'ai mal à en mourir ! » Tilopa le toucha et Naropa fut rétabli.
Un jour, Naropa implora Tilopa de lui transmettre des enseignements profonds. Tilopa fut extrêmement irrité. Il enleva ses chaussures, puis frappa fortement le visage de Naropa et le fit s'évanouir. Lorsque Naropa se réveilla, il atteignit brusquement la réalisation spirituelle. Tilopa, devenu serein, dit aimablement : « En réalité, si je te fais subir tant de souffrances, c'est parce que tu n'avais aucun moyen de purifier ton karma par toi-même. A travers ces situations dangereuses, tu ne pouvais pas avoir de soupçons, d'hésitations ou d'incompréhensions. Par contre, tu pouvais obéir attentivement à tous les ordres. Tu as pu ainsi surmonter les ennuis et atteindre la réalisation spirituelle. » |