Les êtres sauvent les Bouddhas |
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Rinpoche fit le discours le 9 mai 1993
Rinpoche le réitéra dans l’Association Vajrayana (France) en juillet 1993
Mis en ligne sur le site le 15 septembre 2014 (environ 21 ans après)
Introduction |
1. |
A cause des distorsions cognitives et des illusions, tous les êtres ne sont pas capables de constater ni de comprendre que leur propre esprit est Bouddha. Si l’on sait que son esprit est Bouddha, on ne devra pas et n’ira pas non plus essayer de trouver Bouddha au-delà de son propre esprit. |
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2. |
Celui qui cherche Bouddha avec son propre esprit ne comprend pas du tout en fait ce qu’est Bouddha. Ceux qui recherchent Bouddha hors de leur propre esprit ne réalisent pas que leur propre esprit est déjà Bouddha. C’est exactement ce que les Patriarches ont dit : « Les pratiquants aiment poser une autre tête au-dessus de leur tête (cela signifie que cela se répète et est redondant). » |
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3. |
Dans le [Sermon de la Lignée du Sang (血脈論)] de Bodhidharma (remarque : Bodhidharma, un moine bouddhiste qui avait vécu au Ve ou VIe siècle et qui était considéré comme le fondateur du Bouddhisme Zen en Chine), il est dit : « Les Bouddhas ne sauvent pas les Bouddhas, …, les Bouddhas ne chantent pas les Sutras. Les Bouddhas n’observent pas les préceptes et les Bouddhas n’enfreignent pas les préceptes. Les Bouddhas ne cultivent pas les bonnes actions et les Bouddhas ne cultivent pas les mauvaises actions. Les Bouddhas ne sont pas diligents et les Bouddhas ne sont pas oisifs. …, un Bouddha n’est pas un Bouddha ; ne L’interprétez pas comme un Bouddha. » Pour la phrase "les Bouddhas ne sauvent pas les Bouddhas", il ne faut pas mal comprendre que Bouddha Sakyamuni ne sauve pas Bouddha Amitabha ou que Bouddha Amitabha ne sauve pas Bouddha de Médecine. Sa signification originelle est que notre propre nature est essentiellement un Bouddha dans laquelle nous possédons la sagesse, les bénédictions, la vertu et les mérites. Ainsi, les Bouddhas ne sauvent pas les êtres (qui sont des Bouddhas de leur propre nature) ; les Bouddhas vous mènent uniquement à vous plier complètement à votre propre esprit et à devenir des Bouddhas. C’est la raison pour laquelle les Bouddhas ne sauvent aucun Bouddha ni aucun être. Il n’y a pas d’êtres à sauver par les Bouddhas car tous les êtres se sauvent eux-mêmes.
Puisque l’on possède soi-même la nature éveillée parfaite (c'est-à-dire la nature propre / la nature inhérente), on est invisible et intangible ; et on ne cultive ni ne travaille plus. Dans ce cas, pourquoi a-t-on besoin de chanter des sutras ? Comme notre propre nature est pure et sans tache, c’est déjà un précepte parfait et il n’y a donc plus de préceptes à observer. N'ayant aucune discrimination dans un esprit impartial, d’où vient la différenciation entre le bien et le mal ? Avec notre propre nature parfaite et remplie d’une myriade de vertus, on est également libéré de la diligence ou de l’oisiveté.
Pourquoi dit-on qu’un Bouddha n’est pas un Bouddha ? Selon le【Sutra du Diamant】, « Le Tathagata n'a pas d'endroit d'où venir, et n'a pas non plus d'endroit où aller. C’est pourquoi Il est appelé un Tathagata. ». Bien que la Vacuité ait un nom, elle n'a aucune forme. Comment peut-elle être considérée comme réelle ? De même pour les Bouddhas, c’est pourquoi l’on dit qu’un Bouddha n’est pas un Bouddha. Puisque les Bouddhas sont invisibles et intangibles, Ils ne peuvent pas être considérés comme réels. Bien qu’Ils soient invisibles et intangibles, les Bouddhas ne sont pas annihilés. La sagesse des Bouddhas peut être partout et être consciente de tout sans demeurer dans quoi que ce soit, mais ce n’est toujours pas un état réel. En conséquence, un Bouddha n’est pas un Bouddha, ne L’interprétez pas comme un Bouddha. |
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4. |
Ce sont les "êtres" qui sauvent les Bouddhas. Pourquoi ? |
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Discours principal |
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Dans le [Sermon de l’Eveil (悟性論)] de Bodhidharma, il est dit : « Les êtres sauvent les Bouddhas parce que l'affliction crée l’éveil. Les Bouddhas sauvent les êtres parce que l’éveil élimine l'affliction. Il faut savoir qu’il n’y a pas d’absence d’affliction et qu’il n’y a pas d’absence d’éveil. Il faut savoir que s'il n'y a pas la présence d'affliction, il n'y aura rien pour créer l'éveil. S’il n’y a pas la présence de l’éveil, il n’y aura rien pour éliminer l’affliction. Quand on est dans l’illusion, ce sont les Bouddhas qui sauvent les êtres. Quand on est éveillé, ce sont les êtres qui sauvent les Bouddhas. Pourquoi ? Les Bouddhas ne deviennent pas des Bouddhas par eux-mêmes ; Ils sont tous sauvés par les êtres. » |
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La signification de "Les Bouddhas ne deviennent pas des Bouddhas par eux-mêmes ; Ils sont tous sauvés par les êtres" est que : les Bouddhas et les êtres se complètent mutuellement. Donc, il n'y aurait pas de Bouddha s'il n'y avait pas d'êtres. Les Bouddhas sont ceux qui ont un esprit pur alors que les êtres sont ceux qui ont un esprit avec de l’affliction. Quand on est libre de l’affliction, on est alors pur. L’appellation des Bouddhas est engendrée par (la présence) des êtres ; de même, l’appellation des êtres est engendrée par les Bouddhas. En d'autres termes, lorsque les êtres éliminent l’affliction et s’éveillent, ils atteignent la Bouddhéité. S'il n'y avait pas d'êtres, atteindre la Bouddhéité ne serait pas possible. C’est la raison pour laquelle les Bouddhas ne deviennent pas des Bouddhas par eux-mêmes. |
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Les Bouddhas considèrent l'"ignorance" comme leur père et le "désir" comme leur mère (l'ignorance et le désir représentent tous deux les êtres).
L'ignorance est la cause de tout, et lorsqu'elle s’associe au désir, ils deviennent la cause de la renaissance. Si les êtres peuvent éliminer l’affliction de l’ignorance, comme les trois poisons, à savoir les vues erronées, le désir et la colère, etc., tout en étant capable de se libérer de la contamination ou de la souillure des cinq désirs (la richesse, le désir sexuel, la nourriture, la gloire et le sommeil) et des six gunas (la vue, le son, l’odorat, le goût, le toucher et la pensée), et aussi, si leur esprit peut être préservé sans suivre les changements de leurs projections mentales dans les circonstances pour que cet esprit dans l’instant présent soit très propre et pur, ceci correspond à l’apparition de l’esprit de Bouddha et ils ne sont pas différents de Bouddhas. |
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Les êtres sont ignorants. Les êtres sont désireux. L’ignorance et le désir sont comme la paume droite et la paume gauche qui ne sont pas d’une grande différence.
L'ignorance et le désir sont les pseudonymes des êtres. Les deux créent une affliction qui fait que l’esprit circule sans fin parmi les trois poisons de l’avidité, de la colère et de l’ignorance. Ceci provoque la dégénérescence des êtres dans les cycles de vie et de mort sans la capacité de s’en délivrer éternellement. L'ignorance est comme une fosse tandis que le désir est semblable à une cavité ; ainsi, il est dit dans le Bouddhisme : « Remplissez la fosse de l'ignorance et nivelez la cavité du désir ». L’ignorance et le désir sont juste comme la paume droite et la paume gauche qui dépendent l’une de l’autre et qui ne se quittent jamais. Bien qu’ils portent des noms et des formes différents, tous deux sont liés au même corps et au même esprit. |
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Quand on est dans l’illusion, on est sur cette rive ; quand on est éveillé, on est sur l'autre rive. En fait, il n'y a pas de distinction entre cette rive et l'autre rive. Le Tathagata n'est ni sur cette rive ni sur l'autre rive. Il ne reste pas non plus au milieu du courant.
Quand on est dans l’illusion, on est un être ; quand on est éveillé, on est un Bouddha. Cette rive fait référence aux gens ordinaires tandis que l'autre rive fait référence aux Bouddhas. Le Tathagata possède le Tathata (la véritable nature) et la nature imperturbable. Comme Il peut pleinement comprendre Sa perception, Il est totalement insensible aux objets du domaine externe. Ayant parfaitement maîtrisé l'unité fondamentale de l'Univers (le Monde est considéré comme vacuité), il n'y a en fait rien à venir. Tout vient vraiment de la réalité. Ainsi, il n’existe ni cette rive en tant que "tatha (signifiant : la réalité ultime ou la réalité telle qu’elle est ou ainsi)", ni l’autre rive en tant que "agata (signifiant venu)". Un Tathagata ne reste pas au milieu du courant c’est-à-dire que le "milieu" se trouve dans une position qui n’est ni à l’avant ni à l’arrière, et que le "courant" désigne un flux continu sans interruption. En conséquence, il n’y a rien pour rester sur cette rive ou sur l'autre rive. Le "milieu du courant" se réfère ici au Hinayana parce que les gens du Hinayana ne sont ni dans l’état de personnes ordinaires ni dans l’état du parfait éveil de la Bodhi. |
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Une fois que l’on réalise que son esprit est vide sans forme, on se détache de l’illusion et de l’éveil. Comme on se détache de l'illusion et de l'éveil, il n'y a naturellement pas cette rive ni l'autre rive.
Si l'on peut comprendre parfaitement le sens des doctrines, on comprendra sans aucun doute que l’esprit est vide, sans forme. Ainsi, on ne s'attache pas à l'esprit vide et on peut rester intact à la forme d'objets externes en toutes circonstances. Instantanément, on s'éloigne non seulement de l'illusion, mais aussi de l'éveil. Puisque l’on s’éloigne de l’illusion et de l’éveil, il n’y a pas d’autre rive. Quand il n'y a pas l'autre, il n'y a certainement pas celle-ci (la rive) non plus. |
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Note : |
La description et l'interprétation textuelles ne peuvent décrire que la surface et les significations les plus superficielles des Sutras. Les annotations et les idées principales mentionnées ci-dessus ne peuvent pas mener les lecteurs à saisir ni à comprendre en profondeur la signification des Sutras, ni à expérimenter les doctrines encore plus profondes, subtiles et mystérieuses. On espère que les lecteurs consulteront leur propre Guru en guise de conclusion et qu’ils pourront pratiquer, comprendre et expérimenter en personne : « Quand on est dans l’illusion, ce sont les Bouddhas qui sauvent les êtres. Quand on est éveillé, ce sont les êtres qui sauvent les Bouddhas. » |
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Post-scriptum (SA) : |
Il y a vingt-deux ans, lorsque Rinpoche fit le discours sur l’enseignement clé de ce "Bouddhisme tantrique sans forme (remarque : le pratiquant ne devrait pas saisir la forme ou la non-forme)", la plupart des disciples, y compris moi-même, ressemblaient à une personne sourde qui entendait le tonnerre à cause du fait que notre karma était tel que nous n’arrivions pas à ouvrir notre esprit et à voir notre propre nature. C'était comme si, lorsque le Bouddha parlait du【Sutra Avatamsaka (華嚴經)】à neuf reprises, Ses grands disciples n’étaient pas capables de comprendre les doctrines qu'Il avait exposées. A l’heure actuelle, j'ai assez de chance de pouvoir lire avec respect le【Sutra Avatamsaka】et je me rappelle de la situation de l’époque. Rinpoche utilise constamment sa sagesse suprême, sa compassion infinie ainsi que sa patience incomparable pour guider tous les disciples vers l’état de l’Eveil. Je souhaite sincèrement que nous, ces disciples qui sommes encore étroitement enlacés par l'ignorance et le désir, puissions bientôt atteindre l’Eveil afin que nous ne décevions pas notre Rinpoche qui s'est toujours consacré à nous instruire de façon désintéressée. |
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