Discours du Rinpoche en Juin 1990
Le 20/05/2000 (environ 10 ans plus tard) réitéré par Rinpoche
Le 01/01/2005 (environ 5 ans plus tard de nouveau) mis en ligne dans le site
Il y avait deux dames âgées qui pratiquaient le Bouddhisme. Un jour, elles s’étaient données rendez-vous pour aller prier au temple. Sur le chemin, elles virent un cadavre dénudé. Madame Chan pensa sur le moment : « Une citation du Sixième Grand Patriarche du Bouddhisme Zen dit : ''Puisqu'il n'y a rien (vacuité), où de la poussière pourrait-elle se déposer ?" » Elle "renonça" à ses pensées mondaines et s'en alla. Madame Lee vit le cadavre complètement dénudé, exposé à la vue de tous, et ne put s'empêcher d'éprouver de la tristesse. Elle considérait que c'était, après tout, une "personne", des restes d’un être humain qu'on devait respecter. Elle retira alors sa veste pour couvrir le cadavre.
Comme les deux dames âgées avaient pratiqué de manière inadéquate le dharma, elles ne purent atteindre le Domaine de Bouddha lorsqu'elles moururent, et revinrent alors à l'état d'êtres humains. Madame Chan se réincarna en la femme d'un riche officier du gouvernement. Elle eut cinq garçons et cinq filles et il était dit que c'était les "dix parfaits". En outre, elle était entourée par ses enfants et ses petits-enfants dans la prospérité et la joie. Quant à Madame Lee, elle se réincarna en la femme d'un homme ordinaire et n'eut pas d'enfants. Son mari n’avait ni une grande richesse, ni un statut social élevé, mais elle ne manquait de rien dans sa vie quotidienne.
Après avoir achevé leur seconde vie, elles se présentèrent devant le Roi de l'Enfer. Madame Lee demanda : « Pourquoi mon acte de bonté ne m’a-t-il pas apporté de la richesse et de la gloire ? »
Le Roi de l'Enfer répondit : « Madame Chan pouvait réciter la doctrine du Sixième Grand Patriarche du Bouddhisme Zen représentant le principe du "sans" forme et manifestant son bon état d'esprit intérieur. Elle fut récompensée en conséquence. C’était vrai qu’elle avait expérimenté le côté séduisant de la vie, avec toute la richesse et le bonheur qui étaient liés à la gloire et la fortune ultimes. Cependant, elle était la femme d'un officier du gouvernement. Tout au long de sa vie, elle souffrait de constantes disputes, de luttes de pouvoir et de discordes familiales. Elle devait aussi supporter l'infidélité de son mari qui avait de nombreuses épouses et concubines. Elle devait assumer les responsabilités d'une grande famille. Elle devait éprouver la douleur d'un accouchement, vivre toutes les anxiétés et les chagrins d'une mère pour ses enfants. Elle devait travailler rudement durant toute sa vie. J'avais, à l'époque, condamné Madame Chan à ce genre de vie parce qu'elle avait cité la doctrine bouddhiste du Sixième Grand Patriarche. Je voulais la mettre à l'épreuve afin de savoir si elle pouvait vraiment "renoncer". Quant à vous, bien que votre vie fût moyenne et calme, vous n'avez expérimenté aucune des douleurs et souffrances de Madame Chan. Votre vie était tranquille et paisible, vous avez eu un beau mariage et vous avez savouré les fruits d'une vie simple et sans soucis. En comparaison avec celle de Madame Chan, n'est-ce pas mieux ? Je vous avais condamnée à une telle vie parce que vous aviez atteint l'état d'"Equanimité" des "Quatre Pensées Illimitées (Quatre Incommensurables)" (Compassion, Bienveillance, Joie et Equanimité). Vous avez fait preuve de compassion et de bienveillance lorsque vous avez "abandonné" votre seule veste pour couvrir le cadavre. Votre action exprimait le principe du "avec" forme et votre état d'esprit intérieur était aussi bon. Ainsi, vous ai-je donné une autre récompense de bonne fortune. »
Après avoir écouté le jugement du Roi de l'Enfer, Madame Lee comprit subitement tout. Durant ses vies antérieures, elle n'était en fait pas encore éveillée à la vérité du Dharma. Les états de "avec" forme et de "sans" forme sont tous deux importants. On ne doit pas s'attacher obstinément à la "vacuité", ni obstinément à la "possession". Sinon, quelle est la vraie signification du bonheur ? Plutôt que de s'efforcer constamment à trouver la gloire, le prestige, la richesse et le luxe dans une vie, ne serait-il pas mieux d'apprécier le bonheur d'une vie simple et sans soucis ?
Madame Chan dit aussi : « Lorsque je passais à côté du cadavre dénudé sans m'en préoccuper, je pensais que cela représentait un état de "non attachement". Il ne m'était jamais venu à l'esprit que je pouvais finir dans une telle famille aristocratique. Toute ma vie, ce que je pouvais faire, c'était de "souffrir" en silence ! Il y avait une grande distance entre ma pratique du dharma et le vrai état de "non attachement". Je suis prête à recevoir tout jugement que le Roi de l'Enfer m'attribuera pour ma prochaine vie. »
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